Une femme battue s’émancipe
Il reste encore demain ! :
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Ce film est un véritable phénomène en Italie ! Et il mérite son succès.
L’histoire se déroule au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dont l’Italie ressort perdante. Nous sommes plongés dans le quotidien d’une famille très modeste, qui vit dans les sous-sols d’un bâtiment, en plein Rome. Cette famille est composée de 3 enfants plutôt turbulents. Il y a 2 jeunes frères, qui ont un vocabulaire grossier et qui se chamaillent sans arrêt, au grand désespoir de leur mère. Et il y a la grande sœur, âgée de 16 ans, qui a elle aussi son caractère bien trempé. Les parents doivent également assumer le grand-père grincheux et capricieux, qui ne bouge jamais de son lit. La maison, bien que petite, est donc très vivante, et surtout loin d’être calme. Delia, la mère de famille, n’a pas le temps de s’ennuyer.
En 1947, dans les mentalités, c’est encore à la femme d’assumer la gestion de tout le foyer. Delia est donc contrainte de gérer toutes les tâches ménagères, les repas, et le vieux qui se plaint tout le temps. Mais ce n’est pas tout ! Elle doit aussi enchaîner les petits boulots, et donner tout ce qu’elle a durement gagné à son mari. Il lui prend tout son argent, en plus d’être intransigeant sur l’entretien de la maison et les repas. Delia n’a malheureusement pas la vie douce…
Effectivement, son mari, Ivano, est complètement macho et Delia est totalement soumise. C’est Ivano qui détient toute l’autorité, il est tout en haut de la hiérarchie familiale et Delia tout en bas. Ce qui est très bien illustré par une réplique, lorsqu’un jour le père s’adresse à sa fille, et lui dit tristement : « il n’y aura plus de femme à la maison quand tu partiras »
Son épouse est inexistante à ses yeux. Ivano n’a aucune considération pour Delia, ni aucune reconnaissance pour tout ce qu’elle fait pour la famille. Selon lui, Delia n’accomplit que son rôle de femme et n’a pas à être félicitée pour ça.
La maman encaisse en silence, sans jamais se plaindre. Elle se contente de s’écraser face à l’Homme de la maison. Pourtant son mari n’est pas seulement exigeant, il est aussi très violent… Il bat sa femme sans pitié, pour le moindre prétexte. Il enchaîne les coups sans raisons valables.
D’ailleurs, dès le début du film, on nous met dans l’ambiance. Dans la première scène, Delia se réveille et dit gentiment bonjour à son mari. En réponse, il lui donne une grosse gifle sans dire un mot. Ce que j’ai trouvé terrible, c’est que tout le monde est au courant, mais personne ne réagit. Les enfants entendent tout depuis leur chambre et les voisines observent le spectacle par la fenêtre. Malgré la pitié, jamais personne n’intervient …
Le film nous montre alors le combat que va mener Delia pour tenter de s’émanciper. Elle va surtout se battre pour que sa fille ne tombe pas dans le même schéma qu’elle. Son vœu le plus cher, c’est que sa fille trouve un mari qui la respecte et qui la rende heureuse.
Ce qui est remarquable dans ce film, c’est l’équilibre parfait entre l’humour et le drame. Ce qu’ils cherchent à mettre en évidence est tellement violent qu’il faut le partager à travers l’humour. Ça devient plus digeste à regarder. Par exemple, les scènes de violences sont vachement théâtralisées. Quand Delia se fait battre par son mari, c’est comme s’ils étaient en train de danser. Il y a une musique entraînante, et les acteurs interprètent une véritable chorégraphie. Ça permet d’adoucir la cruauté, d’alléger l’ambiance dans la salle. C’est tourné à l’absurde, pour que la situation ne soit pas trop terrifiante pour le spectateur.
Il y a également plein d’interactions entre les personnages vraiment amusantes. C’est une drôle de sensation de pouvoir rire dans des situations si brutales. Cette comédie tragique m’a fait rigoler à cœur joie. Je l’ai adoré, et je la trouve très touchante.
Le film nous rappelle que les femmes ont dû se battre, pour qu’on puisse bénéficier de tous ces droits aujourd’hui. Actuellement, ça nous paraît normal et légitime d’avoir autant de droits que les hommes. Mais ça n’a pas toujours été le cas, et c’est encore récent. Delia incarne une de ces femmes, qui tente de s’émanciper le plus discrètement possible. Finalement, elle réussit à faire valoir sa parole, sans même avoir à ouvrir la bouche.
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Chronique : Orégane
Animation : Emma
Réalisation : Léo, Lorenzo
Crédits photos : Luisa Carcavale
Première diffusion antenne : 19 mars 2024
Mise en ligne : Orégane
Publié le 21 mars 2024
Modifié le 25 mars 2024
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