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L’usage du monde, une pièce qui invite au voyage

Martin | 19 décembre 2023

En 1953, le Genevois Nicolas Bouvier se lance dans un voyage périlleux, partant de Genève, pour explorer la Turquie, l’Iran, l’Afghanistan, jusqu’à l’Inde. Il conduit une Fiat Topolino, est armé de son accordéon et de sa machine à écrire. Ce sera un voyage de deux ans, et il a 4 mois d’argent de poche. Il rejoint son ami peintre Thierry Vernet à Belgrade, qui fera le voyage avec lui.

En ce temps, pas de chaîne d’hôtel internationale, pas d’internet ou de téléphone portable, pas de route balisée. Le voyage, c’est une aventure qui s’entreprend les yeux fermés et le cœur ouvert.

Samuel Labarthe, l’acteur de ce seul en scène, reprend les mots de Nicolas Bouvier pour nous raconter ce voyage extraordinaire. On pourrait penser qu’il est difficile de rendre le mouvement du voyage sur une scène de théâtre, mais il n’en est rien. Des anciens enregistrements, des antique photos retrouvées que récemment, et les peintures de Thierry Vernet accompagnent le récit de Bouvier qui est si bien porté par Labarthe.

Le voyage de Bouvier traverse l’Europe et l’orient, mais c’est aussi un voyage intérieur, qui bouscule la vision de ces deux artistes prêts à entendre ce que le monde a à leur dire.

On retrouve dans la voix de Samuel Labarthe l’exaltation, l’impatience, la déception, le découragement, la joie, l’enthousiasme, la lassitude et toutes les émotions qu’on put habiter Nicolas Bouvier lors de sa traversée. C’est si bien porté, si bien joué, si bien vécu qu’on se demande si ce ne serait pas Nicolas Bouvier lui-même qui est venu ce soir nous raconter son périple. Voilà trois mois que Labarthe joue cette pièce doublement nomade, et pourtant, on est reçu avec tant d’enthousiasme, d’énergie, de générosité en somme, que l’on serait prêt à jurer qu’il la joue ce soir et ce soir uniquement, pour le public ici présent. C’est peut-être à cela que l’on reconnait du grand théâtre.

La pièce nous laisse sur le même passage qui clôt le roman. Bouvier est assis dans un paysage désert, il écoute le vide et le silence. C’est un passage si beau que je vais vous le dire, presque pas en honneur de cette chronique, mais en celui de la littérature :

Ce jour-là, j’ai bien cru tenir quelque chose et que ma vie s’en trouverait changée.
Mais rien de cette nature n’est définitivement acquis. Comme une eau, le monde vous traverse et pour un temps vous prête ses couleurs. Puis se retire, et vous replace devant ce vide qu’on porte en soi, devant cette espèce d’insuffisance au centre de l’âme qu’il faut bien apprendre à côtoyer, à combattre, et qui, paradoxalement, est peut-être notre moteur le plus sûr.


Chronique : Martin
Animation : Emma
Réalisation sonore : Molham et Martin
Première diffusion antenne : 11 décembre 2023
Mise en ligne : Martin
Crédit photo : Émilie Brouchon
Publié le 19 décembre 2023

Une publication de Martin


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