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La QuotidienneMusique

« Le meilleur mot c’est vertige »: Novobisonte de Vestale

Julian | 24 décembre 2023

Nous sommes quelques semaines en arrière. Je suis au studio, en train de préparer une chronique, quand Charly, entre deux « Journal des Bonnes Nouvelles », vient m’en apporter une : il a du boulot pour moi !

Plus précisément, un album de Vestale, groupe formé par les multi-instrumentistes Nicolas Pache, Mark Blakebrough, et Emmanuel Pinget. Originaires de Carouge, les musiciens sont aujourd’hui éparpillés entre Berne, Berlin, Fribourg et Malmö. Ils ne sont pas inactifs pour autant ! En collaboration avec Gil d’Andrès et Rebecca Short au chant, ils sortent en cette fin d’année leur opus Novobisonte.

Je ne vais pas passer par quatre chemins, cet album est le plus ambitieux que j’ai eu à chroniquer jusque-là, ou du moins le plus sophistiqué. Il y a beaucoup à en dire.

Commençons par les arrangements: les influences du groupe sont éclectiques, allant du post-rock des années 2000 à la chanson française, en passant par la musique classique. À travers un tel patchwork on obtient des compositions dont la dynamique va du doux et atmosphérique à l’explosion rock des guitares saturées.

Pour autant, les instrus ne suivent pas toutes cette même formule. On retrouve aussi du rock plus « conventionnel » comme leur reprise d’un chant de résistance italien « Fischia il Vento », ou le très punk « Eden en Flammes », tous deux chantés par Rebecca.

Et pour quelque chose étant largement produit à la maison et à distance, le résultat est fou ! Tu voyages dans plusieurs paysages différents sans que ce soit incohérent !

Niveaux paroles, c’est empli de symbolisme que l’album aborde des thèmes engagés, tel le zapatisme ou l’anticapitalisme. Comme dans « Baron P. », par exemple, où Gil, d’une voix qui évoque Serge Gainsbourg, dépeint un personnage qui voit sa vie rongée par le travail.

Mais plus important – et c’est ce qui rend le tout si ambitieux – ces lyrics manient un immense bagage culturel à travers des allusions non seulement à la littérature et à l’histoire, mais aussi à l’anthropologie, et même à la sémiotique ! Comme si Umberto Eco écrivait de la musique entre deux chapitres de son livre !

Pour moi, le titre « Amok », un spoken-word sur l’histoire de ce mot qui désigne une violence passionnelle et incontrôlée, représente le mieux cette démarche. À travers sa personnification, il raconte comment ce terme a été popularisé par l’écrivain Stefan Zweig, sa tombée dans l’oubli, et sa réapparition dans des scènes de crimes, « plus fou et aliéné que jamais ».

Cette érudition et cette poésie font la force des morceaux. C’est aussi ce qui peut les rendre denses, voire fermées à ceux qui n’ont pas les références.
C’est un choix délibéré du groupe, il y a une volonté de leur part de ne pas te dévoiler toutes les cartes ; ils veulent que tu fasses toi-même l’effort de découvrir le sens des chansons.

Pour aborder cet album, pas d’autre solution, il FAUT lui accorder du temps, consacrer plusieurs écoutes, et faire preuve de curiosité ! (Un conseil, les lyrics sont disponibles sur vestale.net : les avoir sous les yeux peut aider).

« Novobisonte » de Vestale, c’est onze titres d’un rock atmosphérique où les textes ont une importance primordiale. Un gros morceau, donc, mais pour peu que tu sois ouvert à de nouvelles expériences rock ou bien intellectuelles, fonce ! Tu n’es pas prêt d’oublier le voyage.

Chronique : Julián
Animation : Emma
Réalisation sonore : Alexis et Sébastien
Première diffusion antenne : 19 décembre
Crédit photos : Patrick Gilliéron Lopreno, Vestale
Publié le 24 décembre

Une publication de Julian


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