menu Home search
CinemaÉcransLa Quotidienne

La petite vadrouille, un Podalydès mineur

Johan | 17 juin 2024

Cette semaine, je suis allé voir le nouveau film de Bruno Podalydès : la petite Vadrouille. Souviens-toi c’est le réalisateur de Dieu seul me voit, Le mystère de la chambre jaune ou encore Liberté Oléron, en résumé un peu le spécialiste français de films fantaisistes drôles et poétiques. La petite vadrouille reprend ces marqueurs mais cette fois-ci dans le cadre d’une croisière fluviale ou plutôt d’un braquage fluvial.

C’est l’histoire de Justine, jouée par Sandrine Kiberlain qui travaille pour un riche investisseur Franck alias Daniel Auteuil. Ce dernier, impressionné par les talents’organisatrice de Justine lui demande de préparer un weekend romantique et original en vue de séduire une conquête. Et pour ce faire il lui donne la modique somme de 14 000 euros en cash, oui c’est vraiment un riche entrepreneur ! Justine et son mari Albin- joué par Denis Podalydès – échafaudent un plan pour préparer un séjour original mais peu cher, afin de se garder évidemment la majorité du budget. L’idée est ainsi de créer une croisière faussement luxueuse sur le canal du Nivernais avec leur groupe d’amis. Fantaisie oblige, les amis sont tous plus farfelus les uns que les autres bien entendu. Chaque péripétie de cette excursion devient alors l’occasion de soutirer de l’argent auprès du fameux Franck l’entrepreneur séducteur : (droit de douane pour passage d’écluses, repas faussement pittoresque et bio, vente de fromages locaux à 400 euros, tout est bon pour que Franck sorte son portefeuille… A ce premier arc narratif se superpose une comédie boulevardière de couple en pleine confusion. Comme on le comprend dès le début du film (je ne spoile pas), la conquête que Franck vise est évidement Justine (ahahaha quelle surprise). Celle-ci y sera-t-elle réceptive ? Son compagnon Albin arrivera-t-il à dépasser sa jalousie ? Je vous le laisse le découvrir ou pas…

L’originalité du scénario, la patte du réalisateur, ou encore son cadre ensoleillé sont a priori les ingrédients d’une bonne comédie. D’autant plus que La petite vadrouille est un vrai film de troupe, presque théâtral. On voit d’ailleurs souvent les personnages se grimer afin d’interpréter différents rôles (éclusiers, musiciens, etc). On retrouve la belle complicité de la fidèle et joyeuse bande d’acteurs de la filmographie de Bruno Podalydès : évidemment son frère Denis, qui a pratiquement joué dans tous ses longs métrages, Isabelle Candelier ou Jean-Noël Brouté qui sont présents depuis Dieu seul me voit ou encore Sandrine Kiberlain qui joue dans son 3ème film avec lui. Le petit nouveau – je n’ai pas dit le petit jeune 😉 – est ici Daniel Auteuil qui s’intègre plutôt bien dans cette sympathique équipe.

Je suis un grand admirateur du cinéma de Bruno Podalydès et pour moi Dieu seul me voit est probablement la meilleure comédie française des 30 dernières années. Mais là, je dois t’avouer que, pour prendre une métaphore fluviale, je suis resté à quai. Certes, c’est un plaisir de voir ou revoir ces acteurs, certes l’histoire est sympathique avec ces pieds nickelés de l’arnaque, certes le cadre est ensoleillé et bucolique et ça peut faire du bien dans ces temps moroses, mais le constat est terrible : je me suis ennuyé.

Le film est paresseux / poussif, dans les péripéties de l’histoire comme dans ses gags… Par exemple, une des arnaques est de faire payer à Franck un péage à chaque passage d’écluse, en sachant que les différents éclusiers n’en sont au final qu’un seul. Une fois on sourit, la deuxième fois ok, à la 3ème on a envie de mettre l’éclusier à l’eau… Pour un film qui est censé être léger et drôle, tu ne ris vraiment pas à gorge déployée, c’est peu de le dire.

Les deux précédents longs métrages de Bruno Podalydès étaient plus citadins, il se moquait gentiment des travers de la modernité (les deux Alfred) ou des affres de la recherche immobilière (l’effet Whaou). Ils étaient légers mais plus caustiques. Ici on a l’impression que le réalisateur a voulu s’octroyer une petite récréation à la campagne avec sa bande, profiter du soleil, et s’amuser tranquillement en attendant l’heure de l’apéritif… et cette langueur transparait vraiment à l’écran. La petite vadrouille avance au rythme de la péniche… c’est très pépère.

Même le réalisateur n’est pas dupe : à un moment, il fait dire au personnage de Franck : « je suis toujours obligé de réveiller ma femme au milieu des films »… ou encore « mais c’est lent cette péniche, allons plus vite à la prochaine écluse » . On peut comprendre que Bruno Podalydès veuille nous faire réfléchir à prendre notre temps, à apprécier les choses douces et simples. Et c’est vrai qu’il est nécessaire de s’ouvrir et de sortir des films d’action ou de super héros où il y a doit y avoir 5 cascades à la minute par peur que le spectateur ne se lasse. Malheureusement la démonstration échoue ici car l’action n’est pas lente et passionnante mais juste lénifiante. La lenteur ne doit pas empêcher le rythme.

Malheureusement, les rôles secondaires ne sont pas vraiment incarnés. Alors que généralement dans les films de Bruno Podalydès, chaque personnage arrive à avoir sa propre humanité en quelques phrases ou moments, ici ils sont accessoirisés, sans vie propre. Ils ne servent qu’à la réalisation des gags. Ceux qui s’en sortent le mieux sont le couple joué par Sandrine Kiberlain et Denis Podalydès qui, confrontés à ce riche entrepreneur, vont se poser des questions sur leur couple.

Cela me fait mal au cœur car j’adore l’univers de ce réalisateur mais je trouve que les éléments qu’il savait si bien doser dans ses films précédents : légèreté, humour, poésie ne fonctionnent pas ici. Cependant, cependant, comme tu le sais il en faut pour tous les publics, et je dois dire – je risque gros là tu vas voir… – ma belle-mère – dont je tairais l’âge par élégance – l’a adoré. Elle n’a pas forcément ri à gorge déployée mais elle a apprécié la fantaisie… et puis après elle a pris une tisane et est allée se coucher…


Chronique : Johan
Animation : Emma
Réalisation : Alexis
Crédits photos : AF Brillot
Première diffusion antenne : 10 juin 2024
Mise en ligne : Johan
Publié le 17 juin 2024

Un contenu à retrouver également sur l'application PlayPodcast

Une publication de Johan


Envie de soutenir un média gratuit,
indépendant et local ?

Rejoins Vostok+


Commentaires

Pas encore de commentaire pour cet article.

Commenter




play_arrow thumb_up thumb_down
hd