Deuxième EP du boxeur lucernois Stoph Bjornson

– Alors Romain, t’as finalement trouvé un album suisse et même un moment pour nous en parler ! Vu le nom es-tu sûr que ce n’est pas plutôt suédois ?

– On peut en effet soupçonner une once de Scandinavie dans le patronyme de Stoph Bjornson. Sa mère ne répondait pas au téléphone, je ne pourrais donc pas l’affirmer. Toutefois j’ai de la matière plus musicale pour tes oreilles avec la sortie de cet EP en octobre dernier. Il est intitulé « Light bird bebe ». Il succède à « Rock star babe ». Venant d’un beau bébé comme lui, on n’en attendait pas moins. Commençons par une présentation générale. Journaliste musical et instrumentiste professionnel Mister Bjornson, compose son projet solo depuis 2022. Evidemment bien entouré il nous distille un rock multi-facettes, jonglant entre groove funky et rock progressif mais efficace.

L’univers sonore et narratif de cet artiste lucernois m’a séduit. Il nous offre une agréable profondeur doublée d’une fougue amusante comme dans ce son nommé « SSL ». Une piste qui n’avait pas été initialement pensée disco selon son aveu mais il a su prendre le tournant vers lequel l’invitait ses riffs. Je fais juste une parenthèse pour rappeler que l’IA ne sera jamais capable de cela. Faire ce pas de côté. Si on s’aide d’ordinateurs créateurs nous n’aurons jamais le plaisir, la galère et surtout le hasard que comporte un processus créatif. Long débat, je referme la parenthèse. L’œuvre de Stoph Bjorson ne se penche pas sur ce thème. Il nous invite généreusement à partager son goût pour le lien filial, la déconnexion, l’amour de ses instruments et la basse en particulier. Cette guitare est mise à l’honneur et occupe la place de base harmonique et rythmique qu’il vient orner de son ample timbre vocal rappelant les Talking Heads ou le merveilleux groupe Nonente auquel tu m’as introduit.

– Yes Sir

– Je m’égare encore. Deux choses à savoir sur le travail de Stoph Bjornson. Je commence par la voix et reviendrai sur la basse. On sent qu’il chante avec du cœur et de la technique. Il doit certainement adopter la posture du chanteur, cela passe par le corps. On étend bien la cache thoracique, comme si on était fier, mais c’est aussi une question de mâchoire et de projection de la voix. En gros c’est un courant de techniques où l’on doit d’abord trouver son timbre avant de le travailler dans un équilibre entre la détente physique et la justesse tonale. En premier lieu cela passe évidemment par l’oreille mais viennent ensuite tout un tas de muscles qu’il faut savoir positionner. La bouche par exemple doit s’ouvrir comme si on baillait. Cela donne du coffre, de l’âme, on vient puiser l’énergie dans tout son buste. En gros c’est ainsi qu’est souvent enseigné le chant, pour le magnifier, l’augmenter à tous niveaux (sonore, émotionnel ou tonale) et décupler ses nuances. Qui peut le plus peut le moins disait l’autre. Le coup de la mâchoire c’est aussi pour cette raison que les chanteur-euse-s d’opéra ont souvent des têtes rigolotes. Notre lucernois lui en use avec brio sans en faire des caisses. Qui dit rock ne dit pas forcément trash.

Retour sur la basse, un instrument sous-coté, souvent discret à l’oreille profane néanmoins aussi important que le froid en hiver. Comme je le disais c’est à la fois mélodique et rythmique, contrairement à la gratte de 6 cordes, souvent catégorisée plutôt mélodique. La section rythmique est souvent consolidée par une batterie qui devient l’acolyte de la basse. Elles forment ensemble une sorte de colonne vertébrale du morceau. Ce sont souvent elles qui structurent un morceau, donnent le tempo et installent une ambiance générale. Comme un métronome qui peut déjà installer un groove. Si on voulait aussi faire l’analogie avec une peinture, ce serait à la fois le canevas et l’arrière-plan de l’œuvre. Ça fait peut-être trop de métaphore mais tu vois le tableau. Toujours est-il que sans ce cadre tu aurais juste un sujet qui se balade dans une immensité vide, ça ne lui rend pas honneur. Je grossis le trait mais ce schéma musical revient régulièrement et il ne faut pas négliger le travail de ces artisans sonores. Un morceau lambda peut par exemple tourner en chef d’œuvre grâce à cette structure, cette profondeur que donne la basse et ses subtilités que je t’enjoins à écouter si tu ne le fais déjà. C’est comme un challenge. « Attends que fait la basse là ? ». On s’aperçoit vite qu’elle apporte plus de couleur que ce qu’on pense.

Interlude zazen avec « Ghibli.mov » dont avait un extrait à l’instant. Hommage à l’immense créateur ce Totoro et Princess Monoké. Tu peux retrouver l’histoire derrière chaque chanson sur le site web de Stoph Bjornson. Une kyrielle de détails s’y cachent, bien précis, comme dans les meilleures pochettes d’album et tu as même les pistes en libre téléchargement ! Je ne te dis pas tout mais on apprend notamment que l’artiste est un animal de nuit, qu’il boxe et fait parfois référence à plusieurs champions et championnes. La boxe qui venait à moi le weekend passé, va savoir comment. On s’est d’ailleurs retrouvé à un super gala du Club populaire de sports de combat. C’était grandiose n’est-ce pas ?

– Oui un beau moment, étonnamment bienveillant et rigolo.
– A refaire. D’ailleurs ça m’a chauffé cette histoire, on ne se mettrait pas sur la gueule après ?
– Mmmh ok
– Top sortez les gants en régie. On va faire du team debuilding. Blague à part, le lucernois qui nous intéresse ici développe une sensibilité appréciable pour un rockeur boxeur. En première position de l’EP la chanson « Veggie Huntress » fait d’ailleurs état de l’amour et de l’admiration qu’il porte à sa sœur. On l’écoutera juste après. « Huntress » signifie chasseuse et « veggie » végétarienne. Déjà une belle intrigue pour commencer. Il continue ensuite par la décrire dans sa joyeuse pluralité et son héroïsme du quotidien. J’en profite pour dire à ma sœur que je l’aime. Comme ça, c’est fait pour les 6 prochains mois. Emballez c’est pesé, balance le son frère.

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Animation: Emma
Chronique: Romain
Production : Lyès & Théo
Première diffusion : 5 décembre 2024
Crédits photos podcast : © Stoph Bjornson
Crédit photo background : © Stoph Bjornson
Publié le : 09 décembre 2024

Une publication de Romain