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La QuotidienneMusique

Brise électro-acoustique de Citron Citron : « Maréeternel »

Romain | 29 septembre 2024

– Faut-il forcément être dans la lutte, dans la sueur et dans les sonorités tapageuses pour faire bouger les lignes ? Peut-être pas. Romain tu viens nous présenter le nouvel album de Citron Citron. Eléments de réponse ?

– Question pertinente à laquelle tente de répondre Karin avec ses « Rock n sobre » sur notre antenne. Souviens-toi avec elle on évoquait le mouvement « straight edge » ou comment ne pas avaler les produits qu’on essaye de nous vendre par tous les moyens, en l’occurrence l’alcool pour ce mouvement punk des années 90. A mes oreilles le duo genevois travaille sur la même réflexion. C’est aussi possible qu’ils s’en tamponnent les amygdales mais je tente une analyse. Je suis fifou. Non sans blague je viens te présenter le deuxième album de ce binôme fraternel qui s’appelle « Maréeternel » en un mot, sorti il y a quelques jours. J’adore la légèreté sonore et l’anti-violence que dégagent ces 11 pistes. Ecoute juste ce truc, là, à la 1ère minute et 30 secondes de la track 5 nommée « Portamento »

– Qu’est-ce donc ? Qu’est-ce qu’il y a ?

– La finesse Emma, la finesse vindieu ! Le violon de Zoé Sjolemma se fond parfaitement avec un synthé spatial et ce dans un écrin océanique de toute beauté. N’as-tu plus de sensibilité ? Où est cette fille que je connaissais pourtant bien ?

– Romain, tu n’es pas obligé d’en faire trop pour une première chronique.

– Ouaip tu as raison. Puis c’est raccord au thème que je voulais aborder. Grâce à leur poésie acoustique Citron Citron nous invite à faire un pas de côté face à la folie des chiffres et des modes. L’album pourrait être une ode à la décroissance, au soin de soi, de nos proches et de nos problèmes aussi suisses qu’universels. C’est relativement intemporel. J’ai ressenti l’album comme une sorte de refus du consumérisme avilissant et une réponse douce à des considération profondes. On a la chance d’être à Genève, nous n’avons pas besoin des frifris, des froufrous et toutes ces futilités fulgurantes. Fichtre, nous sommes calvinistes et notre feu est naturellement attisé ! Notre royaume est ici, pas besoin de l’étendre, de le travestir ou de le rapicoler comme diraient les vaudois. Enfin j’imagine surtout un espace encore plus intimiste avec cet album. Une maison où on se sent bien parce que ça sent le pain et le café. Une capsule où le seul fait d’y pénétrer calme toute arrogance. En son sein Augustin qui est le frère de Zoé, révèle d’avantage sa belle voix, mise en avant pour la première fois sur la chanson « Par un temps pareil » qu’on écoutera tout à l’heure. Les productions de ce groupe s’apprécient comme un apéro de produits simples mais efficaces, en terrasse, pas besoin de plus. Il y a peu d’éléments mais ils sonnent justes. Comparé au premier album qu’ils nous avaient présenter ici-même on sent aussi que le duo a cherché à professionnaliser leur son. On peut se délecter d’arrangements soignés et des basses généreuses qui me ramènent au soin de soi. Savais-tu que certaines fréquences nous sont bénéfiques ?

– Oui comme le ronron des chats ou le V12 d’une Chevrolet camaro

– J’avais d’avantage entendu parler des chats, des infrabasses et des voix graves mais oui c’est ça. N’est-ce point tripant ? C’est un mélange de réactions physiques et psychiques qui nous font du bien avec les ondes entre 20 et 140 Hertz par exemple. La parenthèse scientifique se referme là, je devais toutefois la placer pour dire à quel point la qualité du son de l’album enveloppe son auditeur, comme un pled sorti pour une soirée frisquette.

Ecoutons un extrait de “Nuage défile” où l’on entend des sons quasiment 8bit à la Nintendo d’antan et une boîte à rythme type TR-808 ou 909 à la Roland. Ce bon vieux Roland… Le talent du groupe réside dans cette capacité à tisser un son maillé d’électronique et d’organique. Notamment grâce aux parties vocales toutes soignées, et aux instruments à cordes qui s’attachent parfaitement aux fréquences tirées de machines telles que la Thérémine. Un instrument original pour deux raisons. D’abord il se joue sans qu’on le touche grâce à deux antennes qui forment un angle droit. D’une main on maitrise le volume, de l’autre la tonalité grâce à des capteurs électromagnétiques. Ensuite c’est un des plus anciens instruments électroniques de cette terre, créée par un brillant inventeur russe pendant les années glorieuses du bolchevisme, autour de 1920. Je te recommande de guigner l’histoire impromptue de cet instrument rigolo. Pour revenir à nos genevois, je qualifierais “Maréeternel” d’une heureuse continuité de leur univers flottant entre psychologie artistique et ascétisme éclairé. Pour ceux et celles qui ne connaissent rien aux vieux penseurs grecs porteurs de toges, je veux dire ici qu’il y a une profondeur sous-jacente dans l’écriture de Citron Citron. On pourrait se dire que ce sont des jeunes qui se satisfont de peu, ça ne fait peut-être pas rêver les foules, mais je trouve ça grand. En somme c’est chercher les étincelles du quotidien et confronter ses peurs dans la douceur. L’album nous rappelle qu’on peut faire cela, si on cultive notre créativité et notre rythme, à nous et aux autres. Il faut le temps de vivre ces moments, ils sont fugaces, et la vie aussi d’ailleurs alors autant en profiter. Allez, une lapalissade dans les règles de l’art, ça fait toujours plaisir. Inspiration zéro, mais avec style. Et c’est peut-être ce que nous inspire cette musique. Pas besoin d’en faire des caisses. Faisons notre popote, dans notre coin, nous faisons société, petit travail sur soi-même, +1 pour l’égo, on se concentre sur l’essentiel : faire du beau. Basta! Qu’on nous lâche la grappe avec les bulldozers théoriques et industriels.
On veut juste rester en paix, puis c’est déjà un bon boulot. J’extrapole un chouïa mais, au fond, ne suis-je pas là pour ça ?
– Accordé, ça passe. Mon job à moi est d’ajouter qu’ils seront en tournée de septembre à octobre, à Laufenberg puis Genève le 26 septembre, suivie de Fribourg le 27, Lausanne le 28 puis des villes moins intéressantes comme Berlin, Dijon, Strasbourg et j’en passe.

– Tout à fait Emma Thibert, beaucoup de villes françaises sur la fin de la tournée mais on ne leur en veut pas. Il faut visiter ce pays avec qu’il ne s’écroule, définitivement. C’est toujours mieux de voir les choses…vivantes je dirais. Elle va bientôt capoter Mamie, faut profiter quoi. “Par un temps pareil” Citron Citron.

Animation: Emma
Chronique: Romain
Production : Laura
Première diffusion : 25 septembre 2024
Crédits photos podcast : © Citron Citron
Crédit photo background : © Eleonore Burki
Publié le : 29 septembre 2024

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