Slocum et moi : un film sensible, plaisant mais falot
Petite question rhétorique en préambule, pourquoi va t-on voir un film d’animation au cinéma ? Parce qu’il pleut et que l’on a envie de se débarrasser de ses gosses ? C’est possible. Parce qu’on est à bout de nerfs et que l’on a envie de se débarrasser de ses gosses ? C’est également possible. Parce que comme ça un des parents peut rester à la maison et ainsi se débarrasser de ses gosses ? toujours possible. Au final on voit qu’il y a plein de raisons d’aller voir un film d’animation au cinéma !
Attention, j’ai dû lire un nombre incalculable d’enquêtes pour arriver à cette synthèse. Plus sérieusement on va voir un film d’animation – oui bien-sûr pour divertir les enfants – mais aussi (et surtout quand on a dépassé un certain âge) car ces films peuvent être de vraies pépites, juste magnifiques par leur sensibilité ou leur drôlerie : il suffit de citer Hayao Myasaki ou les studios Pixar pour s’en convaincre. Un film d’animation possède souvent – sinon toujours – un brin de poésie – que ce soit par sa forme par son histoire ou tout simplement parce que cela nous ramène à notre enfance. Dans ce contexte, Slocum et moi, film d’animation dont nous parlons aujourd’hui, conjugue ces différents éléments, pour donner vie aux souvenirs du réalisateur Jean-François Laguionie.
François Laguionie a 86 ans et a une riche carrière dans le dessin animé : après avoir notamment travaillé avec la référence française de l’animation Paul Grimault il a réalisé près d’une dizaine de longs métrages dont plusieurs ont reçu des prix notamment au festival d’Annecy. Tout ça pour dire que c’est un peu une pointure du genre. Il a voulu raconter ici une partie de son enfance dans la grande banlieue parisienne près des bords de Marne. C’est donc l’histoire de François, un fils unique un peu rêveur, avec une maman au foyer, un père cadre moyen. On est quelques années après la guerre, la France optimiste réapprend à aimer la vie, le Tour de France fait rêver les enfants, les guinguettes illuminent les weekends, enfin bref quand la France ressemblait un peu à la Suisse.
Et donc François, 11 ans, le narrateur de l’histoire, va découvrir la passion un peu folle de son père : construire dans le jardin du pavillon familial la réplique du voilier du célèbre marin Joshua Slocum. François lisant le carnet de bord de ce dernier, l’histoire va naviguer entre la description de la vie de la famille autour du chantier du bateau et le véritable tour du monde de Joshua Slocum. A la manière d’un roman d’apprentissage disons pointilliste, le film se construit alors sur une succession de ressentis d’enfants, en particulier sur la relation assez complexe qui lie François à son père.
Alors soyons clair, le tour du monde du navigateur Slocum est davantage au second plan. L’aventure ici est surtout immobile par la construction du bateau : en somme c’est un peu une illustration de l’adage : l’aventure commence en bas de chez soi. C’est une ode à la rêverie, à notre envie de s’évader. Il faut noter que le film est assez autobiographique d’ailleurs, c’est une manière pour l’auteur de se remémorer les moments de vie qui l’ont construit. Le film tente d’explorer plusieurs éléments marquants de son enfance : la relation au père donc, la découverte du dessin, la passion de la mer, la première petite copine… tout cela avec un style d’animation très doux, en 2D, presque désuet mais avec beaucoup de charme.
C’est un film de qualité, on sait à quoi s’attendre : une relation tendre, une belle animation, une certaine mélancolie. Le film s’adresse tant aux parents qu’aux enfants et clairement on regarde Slocum et moi sans déplaisir. Mais je dois avouer je dirais même nous devons avouer (car je l’ai vu avec mon fils de 8 ans) que l’on s’est un peu ennuyé. Ça nous a semblé un peu plat, monotone. Les principaux protagonistes, hormis le père, sont assez falots, les personnages secondaires ne sont pas vraiment développés. L’histoire est simple, voire trop simple. Il manque un peu de romanesque. Alors oui c’est un film qui joue beaucoup sur les nuances de sensations, de sentiments mais encore faut-il que cela se traduise dans l’émotion qu’il nous procure. Et sur ce plan-là c’est un peu raté tant pour l’adulte que je suis que pour mon fils. En synthèse, c’est un joli film d’animation que l’on s’en fait avec amour mais qui manque un peu de caractère, il y a un certain sentiment de déjà vu. Mais bonne nouvelle, si samedi il pleut et que vous êtes à bout de nerfs, il sera une excellente raison pour se reposer de ses enfants pendant quelques heures, et ça c’est toujours bon à prendre.
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Chronique : Johan
Animation : Emma
Réalisation : Lyes et Théo
Crédit image : Agora Films
Première diffusion antenne : 6 février 2025
Publié le 9 février 2025
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