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CultureExposLa Quotidienne

La Genevoise au MAH fait la chronologie de Genève

Michaël Rolli | 1 mars 2025

Ça y est, c’est enfin cette période de l’année où le Musée d’Art et d’Histoire dévoile son exposition XXL. Et cette fois, on fait une remontée dans le temps et plus précisément dans l’archéologie de la ville de Genève.

Je suis allé voir « La Genevoise » au MAH qui a commencé le 31 janvier et autant dire que ce voyage a été un peu trop tranquille. Alors, pour rappel, comme chaque année le Musée invite un ou une artiste à proposer une lecture originale des collections du musée. C’est donc une carte blanche, laissant place à l’inventivité et à la créativité de l’artiste. On s’en souvient, on a eu les pièces très colorées, en rose et vert de Ugo Rondinone, qui montrait les collections à travers de faux cabinets de curiosités. On a également eu la bruyante exposition de Wim Delvoye qui faisait dériver des billes dans les œuvres d’art… et pour cette 5e carte blanche, le MAH a invité l’artiste Carol Bove à réaménager les espaces du rez-de-chaussée. Forte de ces études artistiques en Amérique, la Genevoise revient pour aller aux origines de la ville du bout du lac.

C’est un retour aux racines.

L’expo est un mélange d’archéologie et de modernité, le tout plaçant l’objet et son utilité au centre. Ceux-ci sont donc tous issus de découvertes archéologiques faites sur le sol genevois. Avec eux, Carol Bove retrace plus de 15’000 ans d’histoires enfouis sous nos pieds. Tu l’as compris, ça va du silex et des pièces de monnaie, jusqu’à la voiture.

C’est quoi la spécificité de cette expo ?

Eh bien, l’idée est toute simple : l’expo est construite autour d’une frise chronologique. On voit tous ce que c’est, on en a toutes et tous fait sur nos feuilles en format paysage à l’école et on s’est posé cette fameuse question : comment je vais placer mes dates pour que tout tienne sur une ligne ? Alors y avait les pro en math qui te faisaient des calculs dignes de l’EPFL et y avait les autres qui improvisait totalement en plaçant les dates un peu au hasard, en laissant un espace aléatoirement grand entre elles et du coup qui se retrouvait à la fin de la feuille à devoir mettre les dix dernières époques hyper importantes… toutes compactées vers la fin, à tel point qu’on commençait à écrire un peu en cercle ou carrément sur le bureau.
Bref, si tu te revois faire ça, tu as l’esprit de l’expo. Chaque pièce est une période temporelle avec des objets qui lui appartiennent. Carol Bove place sa première date à moins 15’000. Autant te dire qu’il y avait pas grand-chose à voir si ce n’est le même stratus qu’aujourd’hui qui vraisemblablement ne nous a jamais quittés. Sinon, ce sont aussi les plus anciennes trouvailles archéologiques au pied du Salève : donc silex, armes de chasse et bâtons percés et gravés de motifs d’animaux. Et là tu te demandes ce qu’il y a de novateur dans l’expo, bah c’est ce qui est à côté des objets. En fait, Carol Bove a réalisé des reproductions de chaque objet grâce à une imprimante 3D. Elle a cherché à recréer au plus près la texture de la pierre, du bois, etc. Ainsi, on peut profiter pour une fois dans un musée de toucher les objets qui sont derrière leurs vitres. Franchement, rien de plus fou que de toucher un silex et un bâton en forme de renne qui date de près de 15’000 ans.

Comment ça évolue dans le temps ?

Eh ben, si on part de si loin, on se retrouve forcément face à un problème… le trou dans les découvertes archéologiques. Aucun objet créé entre moins 11’000 et moins 7’500 n’a été retrouvé sous les pieds des genevois. Alors ça s’explique peut-être par la disparition des objets avec le temps, ou bien au fait qu’on n’ait pas encore mis la main dessus… mais ne perdons pas espoir, peut-être qu’avec tous les travaux à Genève, on finira par trouver quelque chose. En tout cas, cette absence de découverte est caractérisée par l’absence d’objets dans près de sept salles du musée… seuls les socles sont visibles, mettant en avant ce vide. Alors, on aurait très clairement aimé voir des œuvres de Carol Bove remplir ce gap, mais l’artiste a préféré rendre évident ce trou dans les découvertes. Peut-être un peu facile, l’expo se rattrape avec des salles participatives mettant notamment à disposition des LEGO dont les goujons connectifs s’adaptent aux points des lettres Braille.

Un vide un peu frustrant du coup…

Il faut attendre les dernières salles pour retrouver quelques objets. Comme une statue assez impressionnante en bois de près de trois mètres de haut d’un aristocrate gaulois… comme quoi… Astérix et Obélix n’étaient pas les seuls à avoir tenu tête à César, les Genevois aussi protégeaient bien leur village, notamment avec leur port celtique.
Finalement, à la façon de notre frise chronologique, tout se regroupe et s’entasse dans la toute dernière salle. Cette fois, plus d’archéologie, mais plutôt la mise en valeur des derniers objets confectionnés à Genève. Il y a de tout : de l’orfèvrerie, à l’horlogerie en passant par la peinture et même l’architecture, avec une porte de prison taguée, vestige de l’ancienne prison Saint Antoine de Genève.

Et pour finir, on a un clin d’œil à notre époque.

C’est en effet, en terminant l’exposition dans le hall principal qu’on trouve une voiture rose, complètement écrasée par un compresseur. L’œuvre est de Sylvie Fleury et s’appelle Skin Crime. Elle apparaît comme un manifeste, une mise en doute des totems de la consommation. L’objet perd finalement son sens premier et devient une création complètement libre, détruisant son utilité et magnifiant l’objet pour lui-même…
Pour cette cinquième exposition XXL, le MAH retrace grâce à Carole Bove plus de 15’000 ans d’histoire, le tout inséré dans un parcours chronologique. C’est jusqu’au 22 juin et c’est une bonne excuse aussi pour profiter des autres espaces du musée avant la restauration du bâtiment. Et pour toutes celles et ceux qui ne peuvent pas s’empêcher de toucher, allez profiter de mettre vos doigts sur des œuvres sans qu’on vous engueule, car cette expo se découvre sûrement bien plus par le toucher.
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Chronique : Michaël
Animation : Emma
Réalisation : Laure et Sébastien
Crédits images : Bettina Jacot Descombes et Stefan Altenburger
Première diffusion antenne : 19 février 2025
Publié le 1 mars 2025

Un contenu à retrouver également sur l'application PlayPodcast

Une publication de Michaël Rolli


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