Home is the ocean, en famille sur les mers
Ça commencerait presque comme un film d’horreur, ceux qui sont tournés caméra à l’épaule, de nuit, dans un espace exigu, avec le halo de la lampe frontale comme seule source lumineuse et les bruits de grincements tout autour. Après on voit la boite de Freedents et le sachet camomille alors ça va !
Ce film qui démarre de la sorte, c’est « Home is the ocean » mais si on n’a pas lu de résumé ni vu de bande-annonce avant, on ne sait pas trop à quoi on a affaire même si le titre nous met sur la piste.
Indice : ça tangue, j’ai le mal de mer et donc nous sommes sur … un bateau !
Tout juste ! On est sur un bateau, avec une famille. Y’a pas de voix off pour nous guider au début, ça rend l’immersion un peu difficile au premier abord-age, (ah…ah…ah je suis devenue comique pendant les vacances!)
Donc je ne sais pas trop ce que je regarde, un documentaire, ça c’est sûr. Dommage et puis à mon avis, c’est pas un trou dans le budget une voix off, cette petite voix qui vous explique ce que vous regardez, où vous êtes, quelle période, avec qui. Là je vois juste une famille qui mange des pâtes sur un bateau. Alors, c’est chouette pour elle mais ça m’embarque pas. Embarquer – barque… D’accord, j’arrête!
Après ce début un tantinet laborieux, on finit par se situer. Nous suivons la famille Schwörer, papa Dario est climatologue et guide de haute montagne en Suisse. Alerté par la fonte des glaciers, il s’est dit « fichtre, il faut faire quelque chose de toute urgence ! Mais que puis-je bien faire !? Je vais partir en voyage autour du monde avec Sabine, ma femme » Mais non Jamie, t’as rien compris. Faire le tour du monde en voilier, aussi écolo panneaux solaires soit-il, ça aide personne. Même gravir les plus hauts sommets à la force des mollets, des pédales et des petits petons, ça n’avance à rien.
Bon j’exagère, iels voyagent autour du monde dans leur voilier pour faire des interventions dans les écoles, les universités et faire de la sensibilisation mais aussi compiler les exemples de meilleures pratiques et essayer d’inspirer les jeunes à sauver le monde, tout un programme. Et iels font des récoltes de données et échantillons dans des coins reculés qui ne sont accessibles qu’en voilier pour mesurer, par exemple, la présence de plastiques dans les mers arctiques.
Le duo de choc pensait faire une expédition de 4 ans, ça fait 20 ans qu’il est sur les mers. Et iels ont eu l’occasion de fonder leur famille à bord avec 6 enfants.
Déjà un exploit en soi ! Je me gère déjà pas moi toute seule sur la terre ferme…
J’ai trouvé que c’était assez pauvre sur les axes narratifs choisis : comme projet écologique, c’est nullissime parce que ça met en avant l’importance de la reconnexion à la nature et la beauté du monde grâce au voyage. Sauf qu’on ne peut pas tous·tes partir en voilier autour du monde.
Alors que le côté expédition scientifique pour prélever des échantillons de trucs improbables qu’on retrouve jusqu’en Arctique, là y’avait de quoi dire mais c’est évacué très rapidement.
L’arc narratif principal, à savoir vivre en famille sur un voilier, offre quelques séquences amusantes comme nos pauvres matelots qui paraissent bien perdus sur la terre ferme à New York. Comment décorer le bateau pour Noël ou encore déterminer un endroit où accoucher pour Sabine, en calculant combien de temps en avance s’amarrer pour ne pas se faire avoir par un accouchement précoce en pleine mer et quel pays et donc quelle langue choisir (ce n’est pas la même chose de hurler « péridurale » en anglais ou en islandais).
On nous montre aussi les moments plus compliqués : un voilier, ça représentait la liberté au départ mais c’est plus compliqué que ça, comment on vit dans 20 m2, avec peu d’espace pour soi, sans eau courante à volonté, ça tangue (c’est pas moi qui le dit pour une fois), on mange du bouillon pendant 4 jours parce que y’a de la houle.
Cette odyssée familiale se présente comme une sorte de « Captain fantastic », ce film de Matt Ross avec Viggo Mortensen. C’est un peu ça mais le fantastique en moins.
Il faut savoir que la réalisatrice Livia Vonaesch les a suivi pendant sept ans pour créer le film, donc j’imagine beaucoup de matériel et de séquences à disposition mais sans avoir forcément une continuité exhaustive. Mais choisir, c’est renoncer. Parce qu’à vouloir raconter à la fois, l’expédition scientifique sur un voilier ET la vie sur un bateau, au final on raconte ni l’un ni l’autre. Au final, c’est un peu un patchwork de moments. Mais un patchwork qui ne fait pas vraiment une histoire. Quand bien même on essaie de bricoler des moments de tension avec certaines séquences. Mais tu ne peux pas créer des moments de tension et de suspense comme pour une œuvre de fiction. Tout simplement parce que la spectatrice que je suis sait très bien que l’accouchement s’est bien déroulé – il y un passage sur l’inquiétude de savoir quoi faire si Sabine doit accoucher en pleine mer. Sinon on ne présenterait pas ces séquences dans l’œuvre finale. Ce serait trop horrible. Donc ces moments de tension tombent à plat. Même quand – attention révélation d’un point de vue philosophique – on nous dit que l’insécurité fait partie de la vie tout comme la mort.
Je relève le défi technique de faire un documentaire avec 7 années de bobines et surtout l’exploit de mettre au monde et d’élever 6 enfants au milieu de l’océan. Ça donne une œuvre mignonne mais qui n’aboutit rien et qui, malgré ces moments marrants, n’arrive pas à décoller. Vous me direz pour un voilier…
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Chronique : Sophie
Animation : Emma
Réalisation : Laure
Première diffusion antenne : 5 mai 2025
Crédits photos : Praesens Film
Mise en ligne : Sophie
Publié le 11 mai 2025
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