Spectateurs! L’hommage d’Arnaud Desplechin au 7ème art

Je vais vous parler du dernier film d’Arnaud Desplechin, réalisateur de « Roubaix, une lumière » en 2019 ou encore « Frère et Sœur » en 2022.
Un cinéaste habitué du Festival de Cannes, l’œuvre dont il va être question y a été présentée en 2024.
Spectateurs ! puisque c’est son petit nom, c’est un objet hybride, qui mêle des images d’archive, avec une voix off qui nous conte le début de la photographie puis du cinéma et n’aura de cesse de nous interroger. Il y a aussi des extraits de films, de « Fantomas » à « Terminator 2 ».
Et il y a des parties fictionnelles où on va suivre Paul Dédalus, l’alter ego du réalisateur, dans son initiation au 7ème art. Tout d’abord, avec sa tendre et douce mamie qui l’emmène voir son premier film au cinéma du quartier.
Je vais citer une phrase de sa mamie qui lui dit « Qu’est-ce que tu regardes, c’est dans l’autre sens ! ». En effet, le jeune Paul Dédalus est perché sur son siège en velours rouge et regarde le fond de la salle de cinéma plutôt que l’écran. Ça représente bien le thème du film et l’inversion : pour une fois, on ne regarde pas uniquement ce qui se passe sur l’écran. On regarde les spectateur·ices. Et de ce côté-ci aussi, il y a des péripéties à raconter. Pourquoi va-t-on au cinéma ? Pour vivre des émotions ? Pour la ressemblance avec le réel ? Ou au contraire l’envie de s’en éloigner ? Le cinéma est-il connaissance ou illusion ? Nous aide-t-il à mieux vivre en effectuant un focus sur ce qui est important ?
Vous l’aurez compris, ce film nous questionne beaucoup sur notre rapport au cinéma. Avec cette question qui revient : qu’arrive-t-il à la réalité quand elle est projetée ?

C’est une sorte de déclaration d’amour. Du réalisateur pour le cinéma. Le titre c’est Spectateurs avec un point d’exclamation ! Je m’attendais à une passion explosive, mais c’est un amour plus intimiste, on te chuchote à l’oreille, les musiques sont douces, l’ambiance feutrée comme lorsque tu es dans la salle de cinéma et que les lumières s’éteignent, que tout le monde se tait et que le silence annonce bientôt l’arrivée du son et des images.
Mais imagine être témoin d’une déclaration d’amour entre deux personnes que tu ne connais pas. Tu trouves que c’est beau, tu comprends que c’est émouvant, tu as même un sourire qui te monte aux lèvres. Mais tu restes quand même un témoin, d’une déclaration qui n’est pas la tienne, face à une histoire d’amour que tu ne connais pas, entre des gens que tu ne connais pas non plus, tu entres dans une intimité dont tu ne partages pas la complicité. Je ne me suis pas vraiment sentie concernée. Ce détachement tient à des questionnements pas toujours compréhensibles au premier visionnage et à des références assez pointues en termes d’artistes, de films et de spécialistes.

Si je te dis Stanley Cavell, Ervin Panovski et André Bazin ?
Par contre, j’ai été passionnée par une scène où Paul Dédalus est à l’université pour ses études. Dans un amphithéâtre presque vide et fort sombre, un illustre professeur en tweed met en parallèle théâtre, cinéma et télévision aux différentes formes d’organisation du politique. Les dispositifs démocratiques du spectacle comme il les appelle. De peur de m’emmêler les pinceaux, je vous laisserais le soin de découvrir cette scène par vous-mêmes.
Mais néanmoins, que faire maintenant que notre société déborde d’écrans, le monde a-t-il plus ou moins de significations ? Je vous laisse réfléchir, vous avez tout le temps.
Par contre, pour moi spectatrice-sans-point-d’exclamation… je me suis faite divulgâcher la fin d’un film que je n’ai pas vu dans un des extraits. Quel manque de bol point d’exclamation !

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Chronique : Sophie
Animation : Emma
Réalisation : Candice et Noé
Première diffusion antenne : 14 janvier 2025
Crédits photos : Les Films du Losange
Mise en ligne : Sophie
Publié le 30 janvier 2025

Une publication de Radio Vostok