Sororité toxique dans September & July

Ah les joies des chamailleries et autres vacheries entre frères et sœurs en période d’adolescence !
C’était pareil avec ma sœur même si on n’en était pas au point de la relation entre September et July, les deux héroïnes du film éponyme de la réalisatrice Ariane Labed dont il est question dans cette chronique.
Une œuvre dont on ne ressort pas indemne, pour moi c’était une heure et demi de malaise. Le film ne m’a donc pas laissée indifférente ! Il a parfaitement rempli sa fonction de produire quelque chose chez sa spectatrice, il ne m’a pas du tout laissée de marbre, je n’ai pas réfléchi à ce que j’allais manger le soir même.

A sa décharge, je l’avoue, ce genre de film, ce n’est pas ma tasse de thé. Déjà parce que c’est une heure et demie de « bullying ». Alors je ne sais pas quelle est la meilleure traduction française de cet anglicisme : brutaliser, harceler, tyranniser? C’est ce que subit July, adolescente de 15 ans, dans son établissement scolaire, harcelée et violentée par ses camarades de classe. Elle est défendue par sa sœur aînée, September, qui n’hésite pas à se montrer violente à son tour pour la protéger et se retrouve souvent suspendue de l’école.

Déjà là, je ne suis pas bien mais si ce n’était que ça ! De ce premier thème, le harcèlement scolaire, simple rampe de lancement, on passe au second, l’emprise toxique et la relation de domination et soumission entre les sœurs.
Parce que September n’est pas en reste pour se montrer sadique elle aussi avec July, exerçant son pouvoir et son influence sur elle, des jeux d’adolescentes qui glissent en défis toxiques et en brimades, comme l’affubler d’un surnom peu sympathique ou siffler pour s’adresser à elle. Le titre original est d’ailleurs plus parlant, puisqu’il s’agit de « September says » en référence au jeu où on donne un ordre à l’autre sous forme de défi – chez nous, on parlerait de « Jacques a dit », « Jacques a dit : fais une chronique ».
C’est donc d’autant plus horrible donc quand votre sauveuse est aussi votre bourreau.

Mais après un événement mystérieux, les deux sœurs et leur mère se réfugient dans une maison au bord de la mer. Et la relation entre les deux sœurs va glisser encore plus loin dans la perversion. Le fantastique va poindre quand on se rend compte que July ressent ce qui arrive à September.

Une ambiance pesante et en tension, accentuée par l’impuissance de la mère à comprendre et gérer ses filles, mais aussi par un choix dans l’ambiance sonore : faire peu appel à la musique mais nous abreuver de bruitages du quotidien comme les bruits de bouche avec supplément vomi, j’adore !

On est embarqué dans un réalisme brut, sans enrobage d’esthétisme glamour, ce quotidien qu’on ne montre pas à l’écran en temps normal. On voit une serviette hygiénique, c’est quand même assez rare. Et on ne la voit pas parce que le sujet porte sur les règles mais juste parce qu’il est normal d’en voir à l’écran, au moins de temps en temps, quand des femmes sont filmées tout simplement. Et la réalité, c’est aussi qu’entre sœurs et frères, il y a cet équilibre terrible entre une connivence fusionnelle – quand on fait corps ensemble contre le reste du monde – et la perfidie d’être la mieux à même de savoir exactement ce qui va faire mal à l’autre. Ce qui rend le tout plus sordide encore, parce que ça parait bien réel.

Pour parachever cette ambiance de tension, le film emprunte quelques codes au genre de l’horreur, ce qui malheureusement rend certains moments assez prévisibles, tout comme la fin – le plot twist – n’est pas surprenante pour les amateur·rices du genre. Pour le côté horreur, j’aurais dû me méfier : le ton est donné dès le début avec les deux sœurs enfants déguisées en jumelles de « Shining ».

Pour résumer, un film assez surprenant, à l’atmosphère angoissante qui explore une sororité dérangeante.

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Chronique : Sophie
Animation : Lionel
Réalisation : Christian et Marlon
Première diffusion antenne : 24 février 2025
Crédits photos : Cineworx
Mise en ligne : Sophie
Publié le 26 février 2025

Une publication de Sophie