Rentrons dans le concret avec « Drum Therapy » de Kush K
– Alors Romain, t’es allé fouiner dans des bacs virtuels lointains n’est-ce pas ?
– Oui, je continue de digger physiquement mais les sorties en ligne me font de l’œil. C’est mon job tu me diras ! Dans un registre similaire je profite de cette chronique pour relayer le constat de plusieurs programmateur-ice-s. Selon leurs dires les gens, tout public confondu, se rendent moins aux concerts et aux DJ sets. Une salle vide c’est drôlement triste et incite à rentrer dans des logiques commerciales peu réjouissantes. Par exemple en invitant des artistes mainstream qu’on remplacera aussi vite que ma paire de chaussette trouée. J’enjoins donc tout le monde à sortir des sentiers battus pour aller se perdre dans les salles obscures aux programmation audacieuses. Je vous assure, il ne vous arrivera rien de fâcheux, vous aurez juste des histoires originales à raconter. Retour sur ce qui m’amène aujourd’hui, un groupe méconnu justement : Kush K ou Krusk Kra devrais-je dire puisque le groupe vient Zürich.
– Es fägt !
– Klar…. Attention, ambiance…
– Quatuor vainqueur du prix Indiesuisse « album of the year » 2020 avec leur premier album, les voilà à nouveau dans l’actualité avec l’EP « Drum Thearpy », disponible depuis la fin d’année passée chez Irascible. Evoquer Indisuisse ne parle sûrement pas au péquin lambda mais c’est tout de même L’« Association suisse des labels et producteur-ice-s indépendant-e-s » à laquelle est accordé un crédit certain. La plupart de nos labels en sont membres. Elle bénéficie donc d’une visibilité directe sur nos créations helvétiques et les défend bec et ongles sur nos territoires ainsi qu’à l’étranger.
L’EP que je viens présenter marque par sa sensibilité et semble s’inspirer de la musique concrète de Steve Reich, Brian Eno mais aussi du rock à la Radiohead. Des musiques que l’on dit novatrices depuis 60 ans, donc plus si novatrice que ça, mais qu’il ne faut pas oublier. Elles comprennent un rapport moins basé sur l’extravagance que sur la profondeur nichée dans la répétition des thèmes ou des lignes instrumentales. Les fines variations te font rentrer dans une ambiance singulière et souvent finement tournée. Les artistes de cette trempe se portent davantage sur le travail progressif des sonorités plutôt que des riffs tapageurs ou des refrains accrocheurs. Ce serait comme constater la différence entre un court métrage et un long métrage. Le long métrage améliore l’approfondissement de l’histoire, pour en apprécier les subtilités alors que le « court » court souvent après la transmission de l’œuvre dans un temps restreint. Les chansons de l’album n’en sont pas longues pour autant. Ce sont des formats standards. Il faut toutefois s’attendre à une production originale qui emprunte aussi à la folk et au grunge. Il y a un peu de Vancouver ou Seattle dans cet album : une facette sombre, organique et un peu louche de la musique. On vogue d’énergies obscures en intentions tonales lumineuses et directes. Comme une forêt dans un sens, elle peut être inhospitalière à souhait puis devenir protectrice voire grâcieuses selon le moment. La clairière de Kush K pourrait être du post-rock diront certain-e-s, ce qui peut aussi signifier que de l’électronique vient s’immiscer ça et là au service des instruments comme le fait si bien Board of Canada, eux sont écossais pour le coup… Pour faire un bref résumé historique, dès les premières vagues d’excitation autour des Beatles, des Stooges et autres bêtes de scènes certain-e-s ont laisser les grattes électriques et les synthés dirent autre chose de leur époque. On peut sentir de la mélancolie, une aspiration à la réflexion, la volonté de se créer un cocon sonore face à la frénésie environnante. L’énergie et les sonorités rock demeurent mais transposées différemment, c’est là que c’est intéressant. Ce sont souvent des albums plus énigmatiques, progressifs et mentaux. Cela permet aussi une liberté d’expression indissociables du genre. A quoi bon faire du rock de papa quand on peut aller vers des horizons inconnus et nuancés ?
– Je te le demande !
– Non JE te le demande ! Bon on ne va pas y arriver. Toujours est-il que les artistes du post-rock ont su utiliser les effets électroniques et les studios à d’autres fins que du simple lissage mercantile ou augmenter les watts pour faire danser les acharnés. J’enchaine en t’invitant à écouter la voix féminine d’une ravissante clarté, lumineuse et teintée d’une jolie pudeur. Elle comporte aussi une facette mystérieuse que l’on pourrait attribuer aux lapons de Suède ou aux Islandais à l’instar de la fameuse Björk.
Je te laisse là-dessus et pourrais encore continuer longtemps sur l’évolution des styles mais aujourd’hui je te laisse découvrir celui de Kusk K.
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Animation: Emma
Chronique: Romain
Production: Laure
Première diffusion: 26 février 2025
Crédits photos podcast: © Kush K
Crédit photo background: © Felix Film fotos
Publié le: 16 mars 2025
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